Il faut rester aux aguets !
Lorsque je fais le compte de mes observations du ciel réussies sur une année, je constate invariablement qu’il ne faut laisser passer aucune occasion. Les nuages, la pluie, le vent viennent en tête pour nous empêcher d’assister aux spectacles du ciel, mais le travail, les rythmes familiaux, la fatigue, la lassitude aussi parfois, prélèvent également leur dîme et grignotent le stock d’observations potentielles. Alors, oui, il faut être à l’affût et profiter des fenêtres météo qui s’ouvrent pour bondir sous les étoiles faire le plein de beauté et de sérénité. Paradoxalement, le souvenir le plus marquant d’une sortie astronomique n’est pas nécessairement celui du phénomène qui vous avait attiré dehors : il faut rester aux aguets donc, et il faut également toujours être prêt à se laisser surprendre !
En fin de semaine dernière, avant les fortes pluies annoncées pour les jours suivants, un ciel d’un bleu magnifique dominait la région de Montpellier. J’ai donc pris mon matériel et je suis monté dans les Cévennes pour admirer et photographier le rapprochement entre la planète Mars et sa rivale stellaire du Scorpion, Antarès. La diffusion de la pollution lumineuse issue des villes côtières était favorisée par la forte humidité déjà présente dans l’atmosphère, mais, à 1 500 m d’altitude, la voûte céleste était vraiment superbe avec Mars et Antarès qui brillaient sur la droite de la Voie lactée. Juste après le coucher du Soleil, comme si quelqu’un avait appuyé sur un bouton, l’impressionnant brame des cerfs a débuté et il m’a accompagné jusqu’à tard dans la nuit, donnant un relief exceptionnel aux forêts invisibles qui m’entouraient et déplaçant sensiblement le centre d’intérêt de cette sortie nocturne.
Images © Guillaume Cannat
Du côté de la technique
Cette première image est une mosaïque de plusieurs champs (12 au total) et, pour vous donner une idée de l’échelle, elle couvre une région du ciel de plus d’une quarantaine de degrés de côté, soit 4 fois la largeur de votre poing bras tendu. En moyenne montagne, la texture de la Voie lactée résiste plutôt bien à l’assaut de la lueur orangée qui monte des vallées et les taches rougies des plus grandes nébuleuses interstellaires sont révélées par la photographie. La pose de chaque image est de 30 secondes avec un entraînement motorisé pour compenser la rotation de la Terre, ce qui explique pourquoi les lumières artificielles visibles à l’horizon font des petits traits. Boîtier Nikon D700 (défiltré) ; objectif de 85 mm diaphragmé à 3,2 ; 1 250 ISO.
Pour la deuxième image, j’ai simplement resserré le champ sur le Sagittaire et le Scorpion, soit une trentaine de degrés de largeur. Les différents amas stellaires du Sagittaire sont visibles tout comme, en haut à gauche, les nébuleuses de la Lagune et du Trèfle. La nébulosité obscure en forme de J couché baptisée la Pipe est perceptible près du centre du champ et, à droite, les étoiles du Scorpion s’enfoncent dans les couches épaisses et brunâtres qui encrassent l’horizon.
La dernière image est un recadrage sur Mars et Antarès au format de l’image d’origine. La planète est actuellement un peu plus brillante que l’étoile, mais la lueur d’Antarès est diffusée par un fin nuage et elle semble plus lumineuse. À droite d’Antarès, remarquez la petite tache grumeleuse de l’amas globulaire Messier 4 que l’absorption atmosphérique commence à rougir.
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